Xavier BLOT, Professeur spécialiste de l'impact du changement climatique dans les organisations et directeur du Mastère Spécialisé Management de la Transition Énergétique, revient dans un interview pour le magazine ANDRH sur les enjeux auxquels les entreprises sont confrontées dans le cadre de la transition énergétiques et le changement climatique, ainsi que sur le rôle central de la formation et du développement de nouvelles compétences en lien avec ces sujets.

ANDRH : Le changement climatique et la transition énergétique impactent les entreprises et les organisations. Qu'avez-vous pu observer à ce niveau ?

Xavier BLOT : Dans ce contexte, les entreprises sont exposées à deux natures de risques :

  • Les risques physiques relatifs à une exposition directe ou non à des événements climatiques extrêmes : inondations, sécheresses, incendies…, qui peuvent venir perturber l'activité d'une entreprise au niveau de sa production, de son approvisionnement en matières premières… ;
  • Les risques de transition recoupent tous les potentiels facteurs aggravants induis par la transition vers une économie bas carbone. Ils peuvent être de nature économique, sociale ou encore réglementaire. Par exemple, dans un contexte de tensions sur les approvisionnements en énergies fossiles (prix du gaz, disponibilité du pétrole), il devient vital pour les entreprises de privilégier des énergies bas carbone. Au-delà, ces risques peuvent aussi impacter leur image et réputation. Dans un contexte où les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux enjeux environnementaux, ils ont tendance à donner leur préférence à des entreprises plus vertueuses. Toutefois, ces risques de transition peuvent également présenter des opportunités en termes de transformation et d'optimisation de leur gestion et organisation. Enfin, c'est aussi un vecteur de visibilité afin d'améliorer leur positionnement auprès des consommateurs.

Sur ces enjeux qui vont se renforcer, quel est le niveau de maturité des entreprises ?

Si la maturité des entreprises reste relativement faible, elle dépend toutefois du secteur d'activité et du niveau d'exposition à ces risques et enjeux liés à la transition environnementale. Par exemple, un vigneron ou un agriculteur qui subit directement les impacts du changement climatique est plus sensible à ces questions qu'une start-up ou une entreprise tertiaire implantée dans une grande ville.

Aujourd'hui, les entreprises déploient essentiellement deux types d'actions : l'adaptation au risque pour apprendre à vivre avec et l'atténuation de son empreinte carbone et environnementale. Ce second pilier est généralement celui qui est privilégiée par les grands groupes et entreprises. Prenons l'exemple d'un cimentier. Ce dernier n'est pas directement exposé aux risques physiques. Toutefois, il doit investir massivement dans l'atténuation de l'empreinte carbone de son activité.

En parallèle, le niveau de maturité des différentes entreprises, tous secteurs confondus, dépend également de leur accès à l'information sur ces sujets. Il peut aussi être la conséquence d’une conviction personnelle des dirigeants ou encore d’une contrainte règlementaire forte qui nécessite une prise en main du sujet. La pertinence et l’efficience des actions déployées par les entreprises restent reliées à leur capacité à se doter ou mettre en place les bons outils, à flécher les bons investissements, à s’entourer des bonnes compétences et à développer le bon leadership pour mobiliser un collectif face à cet enjeu. En effet, cette capacité à développer une forme de leadership climatique est déterminant pour replacer ce sujet au cœur de l’agenda.

Les entreprises ont aussi plus que jamais besoin d'être accompagnées et formées à ce sujet. Pourquoi ?

Au cours des dernières décennies, nous avons beaucoup entendu parler de la transition numérique et de son impact structurant pour les entreprises qui ont dû repenser leur modèle, leur positionnement, leurs métiers et leur proposition de valeur. Aujourd'hui, le changement climatique est un paradigme qui a également vocation à transformer les entreprises, au même titre que le digital.

En effet, le changement climatique ne concerne pas uniquement la direction RSE d'une entreprise. Il impacte le volet règlementaire afin d'être en conformité avec les objectifs fixés par le gouvernement, les achats au regard des critères et de l'empreinte carbone, le marketing pour s'adapter aux nouvelles préférences des consommateurs, les investissements au regard des critères ESG… Toutes les parties prenantes de l'entreprise sont concernées et doivent y contribuer. Et pour ce faire le besoin en compétences est massif. Conscient de cette réalité, emlyon propose des formations destinées aux fonctions et aux métiers qui vont être directement impactés au sein des entreprises.

Xavier Blot, Professeur et Directeur du Mastère Spécialisé Management de la Transition Énergétique
Xavier Blot, Professeur et Directeur du Mastère Spécialisé Management de la Transition Énergétique

Quels sont les programmes de formations qu'emlyon met à disposition des entreprises afin de les aider à mieux appréhender ces sujets et enjeux dans le cadre de la formation et de la montée en compétences de leurs collaborateurs et leurs managers ?

Cette nouvelle donne climatique s'inscrit dans un cadre assez contraint que les entreprises doivent mieux appréhender pour créer des opportunités, affiner leur positionnement stratégique sur le long terme et repenser leurs métiers au regard des enjeux de la transition énergétique et du changement climatique. Elles doivent plus que jamais avoir une posture proactive vis-à-vis de ces défis afin de faire les choix les plus pertinents. Et à notre niveau, notre enjeu est de les aider à mieux les appréhender en mettant à leur disposition des formations qui prennent en compte ces enjeux de transformation et d'adaptation. Nous avons ainsi inclus le sujet du développement durable et du changement climatique dans l'ensemble de nos formations. En effet, il y a deux ans, nous avons créé le label « Sustainable Development Goals Inside » afin d'inclure les Objectifs de Développement Durable (ODD) de l'ONU dans le référentiel des compétences de toutes nos formations. L'ensemble de nos formations ont été auditées afin de s'assurer qu'elles intègrent et couvrent bien les ODD que nous avons identifiés. Au sein d'emlyon, cela concerne aussi bien la formation sur-mesure que les interventions plus ponctuelles ou les masters spécialisés comme celui que nous proposons sur la transition énergétique.

Sur ce sujet, quelles pistes de réflexion pourriez-vous partager avec les DRH et nos lecteurs ?

Le rôle de l'humain et donc la place des collaborateurs sont clés face à ces enjeux. En effet, si la transition numérique n'avait pas vocation à changer fondamentalement la vie personnelle des collaborateurs, ces derniers sont néanmoins directement impactés dans leur vie quotidienne par le changement climatique et la transition énergétique.

Alors que le changement climatique a cette dimension humaine forte et peut s'inscrire dans des valeurs d'ordre écologique et environnemental fortes, ne pas retrouver une forme de prise en considération de ces questions au sein de son entreprise peut créer une dissonance cognitive entre cette dernière et ses collaborateurs. De cette situation peuvent naître des frustrations, des conflits, mais aussi des opportunités pour les collaborateurs qui se mobilisent et lancent des initiatives.

Sur le plan RH, cela implique de travailler sur un audit des compétences par rapport aux enjeux du changement climatique, mais aussi de mieux cerner et comprendre les attentes et valeurs personnelles de chacun afin d'identifier des leviers de changement et de mobilisation, et ainsi insuffler une dynamique positive dans l'entreprise.

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Source : Cet interview a été réalisé pour la revue ANDRH et publié dans l'édition de mars/avril 2023 – Transition Ecologique.

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